Enceinte et adolescente"Johanna est une jeune femme timide, parfois gamine, mais qui va trouver la force d’avouer sa grossesse à ses parents et à son petit ami. Je pense que j’agirais comme elle." Dounia Coesens dans l’Hebdo France 3 du 23 avrilA 15 ans, Johanna est enceinte. La cause ? Un rapport non protégé et deux oublis successifs de la pilule. Chaque année, environ 13 000 adolescentes subissent une grossesse non désirée. Près de 11 000 décident d’avorter. Panique, peur de l’avouer à la famille, doutes, les jeunes filles ne savent pas toujours comment faire face. Fatima Lalem, conseillère conjugale et familiale, indique la démarche à suivre.
« Nous ne sommes pas là pour les juger mais pour les accompagner »Fatima Lalem est conseillère conjugale et familiale dans un centre de planification familiale à Paris. Sa mission ? Accueillir et informer les jeunes sur la sexualité, la contraception, les violences ou encore les Maladies Sexuellement Transmissibles (MST). Elle évoque ici la grossesse chez les mineures.
Vous recevez régulièrement des jeunes filles enceintes. En général, comment est survenue une grossesse non désirée ?Souvent suite à une contraception non appropriée. Il n’est pas évident de bien utiliser un préservatif lors des premiers rapports ou de bien gérer une pilule quand on est jeune. Un rythme différent de celui des adultes ou la vie en famille favorisent les oublis. Parfois, elles l’oublient, car inconsciemment, elles veulent être autonomes et prouver à leurs proches qu’elles ne sont plus des bébés.
Comment se sentent-elles quand elles viennent vous voir ?Certaines arrivent très fragilisées, parce qu’elles subissent des pressions ou parce qu’elles culpabilisent. Nous levons aussitôt cette culpabilité car elles n’ont aucune raison de s’en vouloir. Elles n’avaient pas conscience du risque. Ensuite, nous essayons de vérifier avec elles leur capacité à bien s’informer des risques et nous faisons en sorte que ce mauvais cap soit utile pour la suite, afin d’assurer une meilleure contraception.
Comment se passe l’accueil des jeunes filles enceintes au centre de planification ?Nous sommes là avant tout pour les mettre en confiance, leur offrir un espace de parole, leur donner des informations, les écouter et les accompagner. Nous nous adressons à elles en tant que femmes et ne faisons aucun jugement de valeur. Nous voulons juste savoir comment elles se sentent, si elles le vivent difficilement ou si elles subissent des pressions.
Comment accompagnez-vous une adolescente enceinte au centre de planification ?Elle doit d’abord avoir un entretien avec une conseillère conjugale et familiale, afin d’obtenir une attestation. Cet entretien nous permet de faire le point ensemble, de savoir comment c’est arrivé et surtout de dater la grossesse. L’attestation obtenue, elle peut prendre rendez-vous à l’hôpital ou à la clinique. Si elle le souhaite, nous téléphonons à sa place ou lui prêtons un téléphone. Elle aura également un entretien post-IVG obligatoire, qui permettra de savoir si tout est rentré dans l’ordre et surtout de faire le point sur la contraception.
La prise en charge d’une IVG est-elle gratuite ?Elle peut l’être totalement, que l’IVG se fasse par voie médicamenteuse ou par voie chirurgicale. L’entretien qu’elle passe avec nous est gratuit de même que l’anesthésie générale, pour laquelle il n’est plus besoin de demander l’autorisation parentale.
Certains hôpitaux refusent-ils de prendre en charge l’avortement d’une mineure ?En général, tout se passe très bien. Mais au moindre problème, nous changeons de structure.
Est-elle obligée d’annoncer sa grossesse et sa décision de faire une IVG à ses parents ?Non. La confidentialité est assurée à chaque niveau et c’est à elle de décider si elle veut ou non alerter ses parents. Elle peut venir nous voir pour obtenir une attestation et se faire accompagner à l’hôpital par la personne majeure de son choix (un ou une amie, un parent, nous ou même l’infirmière scolaire). Dans tous les cas, elle aura toujours un entretien seule avec le médecin, afin de pouvoir exprimer les choses qu’elle n’oserait pas dire devant quelqu’un d’autre.
Peut-elle décider de garder l’enfant ?C’est son droit. Il nous est déjà arrivé d’être l’intermédiaire entre une jeune fille et ses parents pour leur expliquer qu’elle ne souhaitait pas interrompre sa grossesse.
Comment réagissent les parents ?Cela dépend du contexte familial. J’ai vu des mères pleurer avec leur fille, mais aussi des situations plus virulentes. Mais globalement, tout se passe mieux depuis que les jeunes filles peuvent avorter anonymement.
Pour aller plus loin
Deux numéros verts “Ecoute, sexualité, contraception, avortement”
0 800 803 803 (nord de la France) et 0 800 105 105 (sud de la France)
Le site du ministère de la Santé
http://www.sante.gouv.fr/
Le site du Mouvement Français pour le Planning Familial
http://www.planning-familial.org/ouverture.php